Interview avec Olaf Thörsen, guitariste de Vision Divine

Après avoir chroniqué le dernier album « Blood And Angels’ Tears » de la légende italienne du Power Metal Progressif Vision Divine, nous avons eu l’opportunité d’obtenir une interview avec le guitariste Olaf Thörsen, fondateur du groupe !

Interview réalisée via Zoom le mercredi 2 octobre 2024.

(Re)Lire notre chronique : « Blood And Angels’ Tears ».

1/ Comment a été élaboré le dernier album « Blood And Angels’ Tears » ? Avez-vous rencontré des difficultés particulières ?

Non, on n’a rencontré aucunes difficultés. C’est même l’album où on a rencontré le moins tellement tout s’est déroulé tranquillement.

C’est peut-être parce qu’on a commencé à l’écrire bien avant. On a démarré l’écriture de l’album un an avant de l’enregistrer.

On a même tellement écrit qu’on aurait pu sortir deux albums. C’est pourquoi on est partis sur cette idée de concept avec « Blood And Angels’ Tears », car un nouvel album verra aussi le jour en 2025 et sera la suite directe du dernier.

2/ Il y a 5 ans d’écart entre votre dernier album et le précédent « When All The Heroes Are Dead », de même qu’il y a 7 ans d’écart ce dernier et le précédent « Destination Set To Nowhere ». Prenez-vous votre temps ou y a-t-il d’autres raisons ?

Oui, on prend notre temps. Mais aussi on ne veut pas attendre trop longtemps.

Entre « Destination Set To Nowhere » et « When All The Heroes Are Dead », le problème c’est qu’on a dû changer de chanteur, et on n’a pas voulu prendre le premier qu’on trouvait. Alors on a pris plus de temps, ce n’était pas facile de remplacer Fabio Lione. Dès qu’on a rencontré Ivan Giannini, on a vu qu’il était parfait pour prendre la relève.

Pour ce qui est des cinq ans d’écart entre le dernier et le précédent, certaines personnes pourraient continuer de penser qu’on met du temps à chaque fois pour produire un album surtout qu’avant il y a eu sept ans d’écart, mais beaucoup ont oublié qu’il y a eu le COVID (rires).

Pour certains, le COVID pouvait signifier qu’on n’avait plus de temps pour écrire un album. Mais pour moi, ça ne veut pas dire ça. Cette période était particulièrement difficile, et ça l’était encore plus pour trouver l’inspiration.

J’avais sorti un album avec Labyrinth, mon autre groupe, mais je l’ai ressenti un peu comme une perte de temps. Ce n’était vraiment pas le bon moment pour composer.

Dès qu’on s’est sentis de nouveau dans le mood, on s’est remis à écrire de la musique et, comme je viens de le dire, on a deux albums sur le tas maintenant. Pour le prochain, on mettra en moyenne beaucoup moins de temps.

Tout ce qu’on peut dire sur le prochain album est que, si vous avez bien apprécié « Blood And Angels’ Tears », alors vous aimerez celui-là !

3/ Comment avez-vous trouvé l’inspiration pour écrire votre dernier album ? C’est assez original d’écrire les chansons sous forme de chapitre.

Oui, on a voulu écrire les chansons sous forme de chapitre. Pour trouver l’inspiration, on a fait ce qu’on fait durant nos plus beaux jours. C’est-à-dire, on s’est réunis avec le groupe dans notre salle de répèt’, on a partagé chacun nos idées sur l’ordinateur.

L’ordi c’est très cool car on peut enregistrer rapidement et tout peut se faire plus vite. Mais il y a un problème c’est que tout semble bien sonner avec un ordi, et parfois on oublie le courant naturel des chansons.

Mais quand on répète, rien n’est artificiel bien sûr. Alors le batteur propose ses idées, le claviériste aussi propose des mélodies etc. Dès qu’on joue quelque chose ensemble, quelque chose qui finit par nous plaire, on garde nos idées et on l’enregistre en studio.

4/ On retrouve diverses influences à travers votre nouvel album, comme des éléments plus sombres avec « Drink Our Blood » ou « When Darkness Comes ». Qu’est-ce qui vous a inspiré ici ?

On n’est jamais inspiré par un groupe en particulier ou un genre spécifique. On joue ce qu’on pourrait qualifier de Power Metal Progressif, mais on n’en écoute pas spécialement en réalité. On est inspirés par pas mal de choses différentes, on écoute beaucoup de styles de musique, on est très ouverts.

Du coup je n’ai de réponse précise à apporter à cette question. La raison est probablement due au fait qu’on écoute beaucoup de musiques différentes, et à cause du temps qu’on a mis pour composer, on a passé plus de temps à écouter autre chose.

J’ai toujours pensé que la musique est à chaque fois inspirée par quelque chose ou quelqu’un. On ne sait pas vraiment.

Je ne me suis jamais assis avec ma guitare devant un papier ou mon ordi en me disant par exemple : « je vais écrire une chanson à la manière de Black Sabbath ». Mais si au cours des six derniers mois j’ai beaucoup écouté Black Sabbath, c’est alors fort probable que je m’en inspire sans que je le sache.

Comme je l’ai dit, on écoute beaucoup de styles différents, donc c’est pour ça que notre dernier album est encore différent du début à la fin.

5/ Comment avez-vous convaincu les différents guests, AC Wild sur « Drink Our Blood » ou encore Alessandro Conti et Ray Alder, sur « The Broken Past » à participer sur l’album ? Et pourquoi les avoir choisis eux ?

Les choisir eux était très simple car on est tous de très bons amis. Le procédé était simple aussi, on les a juste contactés et ils ont tout de suite accepté.

Au même moment, on n’avait pas forcément pensé à ajouter des guests. C’est la toute première fois qu’on le fait. C’est en écrivant les paroles à travers notre concept qu’on s’est dit qu’il fallait qu’on ait différents personnages.

C’est aussi parti d’une blague au départ. On s’est dit : « tiens et si on envoyait un mail à Ray Alder de Fates Warning ? ». Et il a dit oui il était très enthousiaste car, comme il est plus orienté dans une vague Prog, il n’a pas l’habitude de chanter quelque chose de rapide et ça le rendait heureux d’essayer. Il a dit : « je suis vraiment curieux du résultat final, j’ai hâte de voir ce que ça donne ».

AC Wild, de son vrai nom Alberto, on lui a demandé s’il voulait chanter avec nous dans le studio et il a dit oui. Au début il a dit : « Qu’est-ce que je peux apporter à Vision Divine ? Ma voix est trop brutale ». Il était particulièrement surpris qu’on lui demande car le style de son groupe Bulldozer est vraiment orienté Death/Thrash, mais sa voix était parfaite en guise de guest.

Avec Alessandro Conti, on se connaît depuis des années. On a même partagé la même récemment au Japon, où il a joué avec son groupe Trick Or Treat. L’appeler pour lui demander était donc très facile.

6/ De manière générale, on vous considère comme un groupe de Power Metal Progressif. Es-tu d’accord avec ça ?

Je ne sais pas quoi dire (rires). Cela fait 25 ans que je fais de la musique maintenant, oui au début de notre carrière on pouvait parler de Power Metal, puis après de Power Progressif. Mais quand je pense au Prog, je pense à des groupes comme Kansas ou Yes, et dans le Metal je pense à Dream Theater ou même Fates Warning, pour moi mon groupe est différent de tout ça.

Qu’on dise qu’on joue du Power Metal Progressif, ça me va. Après quand on qualifie un genre avec beaucoup de mots différents, ça devient vite compliqué, ça voudrait dire qu’on ne joue qu’un seul style.

On est un groupe qui aime expérimenter. Sans être arrogant bien sûr, on ne veut pas prétendre que ce qu’on fait est intéressant, mais on cherche quelque chose qu’on juge nous intéressant.

On est en 2024, les chansons que j’ai écrites en 1998 étaient différentes à cette époque. Comme on cherche à renouveler, c’est pour ça qu’on est devenus plus Prog par la suite, en voulant faire quelque chose de différent.

Au fil des années, certains fans préfèrent l’époque Power classique et d’autres préfèrent notre passage au Power Progressif. Sur le dernier album, on a tenté de mixer les deux.

Olaf Thörsen, guitariste de Vision Divine.

7/ Quelles sont tes influences principales ?

Comme je l’ai dit, j’écoute beaucoup de groupes et de styles.

Je n’ai pas spécialement de groupe préféré, mais je pourrai citer Fates Warning.

Je ne pourrais pas manquer de citer Judas Priest, mais aussi Kreator qui m’a donné envie de jouer de la guitare. C’est un groupe que je suis depuis la première démo et j’ai toujours adoré. Au départ, je voulais être un guitariste de Thrash et non pas mélodique.

Sur le plan mélodique, beaucoup de métalleux vont être très surpris mais un de mes groupes préférés a toujours été a-ha. Pour un groupe de Pop, la progression d’accords est très compliquée, ils arrivent à faire quelque chose de très mélodique avec plus que quatre accords.

8/ Avec tes diverses influences, as-tu toujours eu en tête de monter un groupe de Power Metal ?

Non, surtout que le Power Metal est un des genres que j’ai le moins écoutés. Je connais bien sûr des classiques comme « Walls Of Jericho » ou les « Keeper Of The Seven Keys » de Helloween, « Episode » de Stratovarius, « Legacy Of Kings » d’Hammerfall ou encore « Somewhere Out In Space » de Gamma Ray, mais je ne connais pas leur discographie. Je ne connais même pas beaucoup de groupes de Power Metal en vrai.

Comme je l’ai dit je viens du Thrash avec Kreator, et je joue des riffs de Speed quand je cherche à composer, un peu à la manière d’Agent Steel.

D’ailleurs, à l’origine pour moi le Power Metal c’était le mouvement américain avec des groupes comme Riot. Les groupes européens comme Helloween on appelait ça du « Melodic Speed Metal » et après d’un coup on a tout mélangé avec le mouvement américain, puis le style est devenu officiel avec les groupes européens comme Helloween.

Je me rappelle aussi à l’époque je m’étais dit : « Pourquoi on est qualifiés de Power Metal ? On ne joue pas du Riot pourtant ! ». C’est aussi à cette époque que Rhapsody avait sorti son premier album, c’était à peu près en même temps que nous.

Mais avec le temps j’ai fini par accepter qu’on qualifie notre musique comme les gens le souhaitent.

9/ Sens-tu Vision Divine évoluer positivement ? Comment justifies-tu les différentes tournures musicales et changements de line-up au fil des années ?

C’est un peu dur de répondre en partant depuis le début, je n’ai pas envie d’être philosophique (rires). J’ai envie que tout le monde change et évolue avec le temps.

Vision Divine est un groupe qui a 25 ans de carrière maintenant. Ce serait bizarre de penser qu’on fait toujours la même la chose en écoutant notre musique, car tout a changé.

La technologie a changé aussi, on enregistrait sur cassette au début et par sur ordinateur. Tout était joué en live, il n’y avait pas DJ. Les instruments étaient amplifiés etc.

La musique autour de nous a changé, on a tous changé. Même moi j’ai 25 ans de plus depuis les débuts avec Vision Divine. Je ne me sens pas comme un vieil homme ni comme un jeune de 20 ans, mais on change.

J’ai aussi envie de répondre que vous changez tous (rires). On peut suivre un groupe pendant des années et d’un coup ils sortent un album qu’on n’aime pas, on peut dire : « ils ont changé ». J’ai envie de leur répondre : « non vous avez changé ».

Mais le plus important avec notre groupe, malgré tous les changements, c’est qu’on a gardé l’âme de la musique avec laquelle on a commencé.

La vie n’est pas une image qui ne bouge pas mais une succession d’événements qui amènent à différents changements.

Un groupe c’est comme une famille, et chaque membre d’une famille change.

10/ Qu’est-ce qui t’a poussé à fonder Vision Divine ? Sachant que tu as fondé Labyrinth 5 ans avant.

Je peux l’expliquer. Comme je viens de le dire, tout peut changer avec le temps.

Labyrinth devenait bon avec l’album « Return To Heaven Denied », et au bout d’un certain moment quand un groupe évolue bien, on peut se dire qu’il est temps de se consacrer à d’autres projets en parallèle comme un album solo.

Mais l’idée d’album solo ne m’enchantait pas car pour moi, un album solo c’est dans la même veine que les grands guitaristes de mon époque tels que Steve Vai, Joe Satriani, Yngwie Malmsteen… Sauf que moi je ne suis pas fait pour faire un album solo de guitare. Pour moi, la guitare ne doit pas être au centre de la composition et un album solo complet juste de guitare ça m’ennuie.

Alors j’ai écrit quelques chansons de mon côté, puis est arrivé Fabio Lione et on a décidé de monter un groupe ensemble. De plus, comme mes différentes idées de chansons ne correspondaient pas aux autres membres de Labyrinth, alors je les ai focalisées avec Vision Divine qui est devenu mon nouveau groupe à ce moment-là.

11/ Est-ce qu’une tournée verra la jour suite à la sortie de votre excellent nouvel album ? Si oui, y aura-t-il une date en France ?

Oui, on a quelques concerts prévus pour 2025 en Espagne, au Portugal, en Allemagne on est en train de planifier. Pas en France pour le moment mais on espère avoir cette chance de pouvoir venir jouer par chez vous, ce serait vraiment une belle opportunité.

12/ Autre chose à ajouter ?

Merci beaucoup pour l’interview ! La réaction depuis votre magazine et de la part des fans en France est sûrement la meilleure qu’on n’ait jamais eue depuis nos débuts. Merci beaucoup et j’espère vous croiser bientôt.

Résumé

BenPMF
BenPMF
Musicien à ses heures perdues passionné de Power, les mélodies et orchestrations épiques illuminent son bonheur. Ce barde des temps modernes puise son inspiration du côté de Helloween et de Gamma Ray sous un air joyeux de Freedom Call. Son univers s’élargit aussi autour des contrées imaginaires de Stratovarius, Dragonforce, Avantasia, Rhapsody, Blind Guardian… Et bien d’autres encore !